L’Etat et EDF sont parvenus à un accord mardi 14 novembre dernier sur un niveau de prix moyen de l’électricité nucléaire autour de 70 euros le mégawattheure (MWh) à partir de 2026 et pour les quinze années suivantes. Ce prix est censé se caler sur le coût global de production, c’est-à-dire prenant en compte les investissements pour la maintenance du parc nucléaire, les réseaux et les nouveaux réacteurs.
En contrepartie, EDF doit impérativement garantir un volume de production nucléaire annuelle a minima autour de 360 TWh, ce qui correspond à la production historique de son parc. L’électricien français promet même d’atteindre la barre des 400 TWh, une annonce surprenante quand on sait qu’en 2022, la production nucléaire était descendue à un niveau historiquement bas de 280 TWh.
Par quels moyens et quelle méthode, EDF peut-elle viser une telle augmentation de sa production nucléaire, déclinante depuis plusieurs années ?
De nombreux arrêts pour maintenance des réacteurs sont programmés, pour des durées déterminées : rechargement du combustible (35 jours, 4 000 à 5 000 actions à mener), visite partielle (90 jours, 12 000 actions), visite décennale (150 à 180 jours, plus de 20 000 actions). Malheureusement les retards sont trop fréquents, la durée de quasiment tous ces arrêts de tranche s’allonge systématiquement, réduisant inévitablement la disponibilité du parc nucléaire et donc la production.
Il apparaît donc primordial d’améliorer la performance des arrêts pour maintenance. Ainsi, pour revenir à la normale, EDF a justement lancé en 2019 le programme START 2025, pour « Soyons Tous Acteurs de la réussite des arrêts de Tranche ». Il se découpe en 4 chantiers :
Ce programme participatif a déjà été expérimenté sur certains sites volontaires et il est entré dans une phase de déploiement généralisé cette année, mais chaque site maîtrise le planning de son application.
Une méthode semblant bien fonctionner. Par exemple, sur la centrale de Paluel (Seine-Maritime), une visite partielle a pu être menée en 100 jours, ce qui n’était plus arrivé depuis 12 ans !
EDF souhaite également augmenter la puissance des réacteurs 900 et 1 300 MW. Pour les 900 MW, il suffit de remplacer le corps basse pression de la turbine, une opération déjà réalisée sur 9 réacteurs il y a dix ans.
Dès 2027, 13 autres réacteurs 900 MW pourraient voir ainsi leur puissance augmenter, permettant un gain potentiel de 30 à 40 MW de puissance électrique. Un délai relativement court, mais Étienne Dutheil, directeur de la division production nucléaire, assure que les équipes EDF se sont mises « en ordre de bataille pour tenir cet objectif ».
Concernant les réacteurs 1 300 MW, augmenter leur puissance est bien plus complexe. Des études avaient été lancées, puis arrêtées. Elles pourraient être de nouveau ouvertes.
Un autre moyen envisagé par EDF pour augmenter sa production nucléaire serait de réduire la fréquence des arrêts de tranche pour rechargement de combustible et donc augmenter la disponibilité des réacteurs. Pour cela, EDF envisage aussi de changer les caractéristiques du combustible MOX, à base de plutonium recyclé, pour passer les cycles de 12 à 16 mois à l’horizon 2028.
Ce changement concernerait tous les réacteurs 900 MW, hormis les 4 de Bugey, déjà en cycle long. Passer les réacteurs 1300 MW sur des cycles de 18 mois est également à l’étude. Il faudrait adapter le système de protection du réacteur et les conditions de réception du combustible neuf.
Le plan d’EDF pour augmenter sa production nucléaire s’appuie donc majoritairement sur une réduction des arrêts pour maintenance et une augmentation de la puissance de certains réacteurs. L’objectif affiché de 400 TWh semble néanmoins très ambitieux et pourrait sonner plutôt comme un effet d’annonce, notamment pour rassurer l’Etat sur la capacité d’EDF à satisfaire la grandissante demande en électricité. Des résultats sont attendus très rapidement, la souveraineté énergétique du pays en dépendra inévitablement.
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