L’accès à l’électricité reste problématique dans certaines régions du monde. D’après l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), en 2022 près de 775 millions d’habitants n’y ont pas accès, dont environ les trois quart en Afrique. Sur ce continent, près de 600 millions de personnes, soit 43 % de la population, n’en bénéficient toujours pas. La qualité de l’approvisionnement par le réseau est en outre limitée, avec de fréquentes coupures de courant, notamment dans les zones rurales.
Pourtant, l’accès à l’électricité a été érigé au rang de priorité pour les Nationaux unies, à travers l’objectif du développement durable (ODD) n°7 : « garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable ».
Alors pour assurer l’électrification de tous les territoires, les gouvernements vont miser sur des solutions encore trop peu déployées : les mini-réseaux électriques.
Les « mini-réseaux » sont des installations comprenant un générateur électrique de puissance modérée (moins de 1 MW) et un réseau électrique très localisé pour alimenter plusieurs utilisateurs finaux. L’objectif est de permettre un accès à l’électricité en produisant au plus proche du lieu de consommation et en distribuant localement.
Les mini-réseaux présentent l’avantage de pouvoir être installés et mis en fonctionnement plus rapidement et à des coûts moins importants que l’extension des réseaux nationaux. De plus, ce sont des systèmes de production d’une puissance plus importante que les solutions individuelles isolées, dont les plus connues sont les Solar home systems (SHS). Ces systèmes individuels utilisent des ressources locales renouvelables mais leur production atteint des limites, notamment en terme de puissance électrique, suffisante pour assurer l’éclairage, mais trop faible pour soutenir des usages productifs significatifs.
L’électricité distribuée sur les mini-réseaux est produite localement à partir d’une grande variété de sources d’énergie. Des centrales fonctionnant au gasoil ou au fioul produisent en permanence et sont souvent préférées aux solutions renouvelables telles que des panneaux solaires ou des éoliennes qui produisent par intermittence.
Il existe aussi des mini-réseaux alimentés à partir d’une énergie produite à l’aide de petits barrages hydroélectriques. Les solutions à énergie solaire couplées avec des solutions de stockage sont souvent les moins chères sur le long terme mais nécessitent un investissement important et un temps de retour sur investissement long qui n’attirent pas les investisseurs.
Il est possible d’opter pour un mode de production hybride, en couplant un moteur diesel et une production solaire ou éolienne. Cela permet d’atténuer les risques de perturbations d’approvisionnement en carburant ou d’augmentations des tarifs, peut aussi être employé. Les systèmes diesel sont confrontés au risque de perturbations de l’approvisionnement en carburant ou aux augmentations de tarifs, tout en nécessitant un investissement plus limité qu’une production entièrement à l’aide d’énergies renouvelables. C’est ce mode de production qui est souvent privilégié dans les nouvelles installations.
Malgré des avantages indéniables, les mini-réseaux n’ont pas encore été fortement exploités pour aider l’Afrique et les autres zones isolées à relever leur défi énergétique. Le manque de modèles commerciaux et économiques viables et de sources de financement suffisantes ralentissent considérablement leur développement et leur déploiement à grande échelle. Les enjeux politiques ne jouent pas toujours en leur faveur, certains voyant d’un mauvais œil l’arrivée de nouveaux producteurs et distributeurs d’électricité sur leur territoire.
D’après des données de la Collaborative Smart Mapping of Mini-grid Action (CoSMMA), près de la moitié des projets étudiés ont connu des échecs au regard du critère de Night-time light (NTL), données de luminosité nocturne fournissant une indication pertinente de l’accès à l’énergie.
Jean-Claude Berthélémy est directeur de la Fondation pour les études et la recherche sur le développement international (FERDI), un programme de recherche sur l’accès et l’électricité. Selon lui, la réussite de ces projets de mini-réseaux repose tout d’abord sur la « bonne conception technique et sur le choix des équipements. Des équipements de mauvaise qualité qui ont été choisi pour réduire les coûts donnent souvent de mauvais résultats ». Il évoque lui-aussi les difficultés d’identifier un bon modèle économique assurant la pérennité du projet et la capacité du porteur de projet à assurer une bonne concertation avec les usagers, d’où la question d’une bonne gouvernance.
Cependant le taux d’échec de ces installations est en baisse et la construction de mini-réseaux a un impact positif sur la réalisation de l’ODD n°7 des Nations unies. Selon un nouveau rapport de la Banque mondiale, les mini-réseaux, auparavant considérés comme une solution de niche, peuvent fournir de l'électricité à 500 millions de personnes d'ici 2030, contribuant ainsi à combler le déficit d'accès à l'énergie.
De plus, le coût des énergies renouvelables est en baisse et l’efficacité énergétique en amélioration. Des signes très encourageants.
Les mini-réseaux peuvent ainsi jouer un rôle important pour le développement de l’accès à l’électricité des populations isolées, particulièrement en Afrique. Si leurs gouvernements choisissent de mener une politique favorable et d’investir dans ces modes de production et distribution d’électricité, ces pays seront les fers de lance d’une transformation mondiale de l’énergie.
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