Le 23 novembre dernier, Luc Rémont arrivait à la tête d’EDF sur décision d’Emmanuel Macron. Une mission colossale attendait le nouveau PDG de l’énergéticien français : redresser la production nucléaire et relancer la construction de nouveaux réacteurs.
Début décembre, Elisabeth Borne lui donnait 6 mois pour présenter un nouveau plan stratégique pour le groupe qui a connu en 2022 des pertes records en raison principalement d’une très faible production nucléaire. Le chantier est titanesque !
En 2022, EDF a enregistré une perte historique de 17,9 milliards d'euros, son endettement atteignant désormais un niveau également record de 64,5 milliards d'euros ! L’entreprise a été plombée par ses problèmes de production de son parc nucléaire, mais aussi par la crise énergétique.
Sa contribution forcée au « bouclier tarifaire » mis en place par le Gouvernement a eu des répercussions énormes sur le groupe. Si son chiffre d’affaires a augmenté de 70% à 143,5 milliards d’euros, en raison de la hausse des prix de l’énergie, EDF accuse une très lourde perte nette sur l’année.
De nombreux clients français sont revenus se fournir chez EDF, mais pour couvrir leurs besoins, l’entreprise a dû acheter de l’électricité à prix d’or sur le marché, sa marge d’exploitation étant alors très fortement impactée.
Philippe Page Le Mérour, secrétaire CGT EDF, dénonce lui l’obligation par la loi depuis 2010 pour « le service public de l’électricité d’abreuver ses concurrents avec en principe 25% de sa production nucléaire ». Or aujourd’hui EDF vend à coût bradé 43% de sa production nucléaire, alors même qu’une bonne partie de ses réacteurs étaient à l’arrêt ! Une aberration pour le syndicaliste qui tire le signal d’alarme depuis de longs mois et s’inquiète de ne voir aucune mesure forte prise par les dirigeants d’EDF et le Gouvernement.
En raison de l’indisponibilité de nombreux réacteurs l’an dernier, la production du parc nucléaire français est tombée à 279 TWh, soit une baisse de 22,7% par rapport à 2021 !
Ce manque de disponibilité des réacteurs est dû principalement aux opérations de maintenance et aux travaux de réparation des centrales touchées par des problèmes de corrosion sous contrainte. Décelés fin 2021 sur des portions de tuyauteries cruciales pour la sûreté des centrales, ces fissures nécessitent de longues réparations. Ainsi, la disponibilité du parc nucléaire français est tombée à 35% au mois d’août !
A cela s’ajoutent le conflit social pour une augmentation des salaires en octobre, entraînant une perte de production nucléaire de 4 TWh, et l’arrêt d’une dizaine de réacteurs en décembre pour économiser du combustible en raison des températures douces et d’une moindre consommation d’électricité.
La production hydro-électrique d'EDF a également fortement chuté en 2022. Elle a connu une baisse dans les mêmes proportions que le nucléaire (- 22,4% par rapport à 2021), atteignant péniblement 32,4 TWh.
Cette plus faible production hydraulique s’explique par les températures plus élevées qui ont mis à sec les barrages, 2022 ayant été l’année la plus chaude jamais enregistrée en France !
Entre une électricité nucléaire vendue à prix bradé, une faible production électrique, des coûts de réparation des centrales nucléaires et sa contribution au bouclier tarifaire, EDF a lourdement perdu financièrement au cours de l’année 2022.
La tâche s’annonce donc très ardue pour le nouveau PDG afin de redresser la barre. D’autant plus qu’EDF doit faire face depuis plusieurs semaines à de nouveaux problèmes de fissures liées à la corrosion dans certaines centrales. La production nucléaire pour 2023 semble d’ores et déjà être menacée, tout comme l’est l’entreprise publique si rien n’est fait par les instances de l’Etat.
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